Guilliet machines à bois, histoire de la société
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Guilliet machines à bois, histoire de la société
1En 1913, l’entreprise Guilliet Fils et Cie emploie 822 personnes (versus 80 en 1885, 300 en 1905) et réalise un chiffre d’affaires de 4 450 000 francs1. Elle fait vivre directement près de 10 % de la population d’Auxerre (22 000 habitants). Elle exporte en Europe occidentale (17 % des ventes) et dans le monde entier. Elle domine le marché des outils (mèches, lames, dents à tenons, à moulures, etc.) et des machines-outils à travailler le bois (scies, toupies, perceuses, mortaiseuses, raboteuses, etc.). Elle fait encore sienne sa présentation de 1895 : « Nous pensons que, dans notre genre, on ne puisse trouver de meilleures machines que les nôtres. » Sa gamme de 450 références s’étend des grosses machines telles que la scie verticale alternative à plusieurs lames pour le débit des bois en grumes (12 500 francs) à la petite machine à mortaiser horizontale (150 francs). Sa clientèle compte de grandes scieries, des ateliers de grande production de menuiserie et de charpentes, des fabriques de wagons, des constructeurs de machines agricoles, des arsenaux militaires et maritimes, mais aussi des artisans spécialisés tels que charpentiers, menuisiers, ébénistes, charrons, carrossiers, tonneliers, sabotiers, etc.
Document 1. Les usines Guilliet à Auxerre vers 1927
Document 1. Les usines Guilliet à Auxerre vers 1927
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Source : Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne.
2Les usines, « les plus vastes du monde dans cette spécialité2 », concentrées en deux ensembles sur la rive gauche de l’Yonne, ont gagné la rive droite.
3L’entreprise contribue-t-elle à l’effort de guerre ? En profite-t-elle pour faire preuve d’une grande innovation ? pour améliorer sa productivité ?
Une forte contribution à l’effort de guerre
Deux types d’activités
La poursuite des productions traditionnelles
4Dès 1914, les ventes de machines et d’outillage à bois aux quincailliers et aux agences de province s’effondrent. Seules celles du dépôt de Paris résistent mieux. Le marché français est désorganisé par les réquisitions des moyens de transport et le départ de la main-d’œuvre au front. Les exportations chutent : sur une base 100 en 1913, elles sont en 1918 à l’indice 21 en Espagne, 26 en Italie et 47 en Grande-Bretagne.
Document 2. La machine universelle Guilliet pour menuisiers et fabricants de meubles en 1914
Document 2. La machine universelle Guilliet pour menuisiers et fabricants de meubles en 1914
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Prix : 4 700 francs ; Poids : 2 120 kilogrammes ; Force motrice : 5 chevaux (3,675 kilowatts).
Source : Catalogue Guilliet et fils (ingénieurs - constructeurs). Auxerre - Paris, 1914, p. 126, BnF.
Les productions de guerre
5Dès la conférence de Bordeaux du 20 septembre 1914, les responsables de l’armée proposent à des industriels de fabriquer un modèle unique de projectile, des obus explosifs de 75 mm. Paul Guilliet offre ses services à Louis Loucheur, adjoint du général Baquet, directeur de l’Armement au ministère de la Guerre, et arrache une commande sans savoir à quel prix, s’il pourra l’honorer et s’il sera payé. L’expérience est jugée concluante par les arsenaux qui réceptionnent la marchandise3. L’intérieur de l’obus chauffé à blanc est foré, sa tête positionnée à l’aide d’une presse, sa ceinture sertie au cuivre rouge, filetée et moletée. Chaque jour 3 000 à 4 000 obus sont acheminés à la gare Saint-Gervais.
Document 3. Quelques ouvriers lors d’une coulée à la fonderie Guillet pendant la guerre
Document 3. Quelques ouvriers lors d’une coulée à la fonderie Guillet pendant la guerre
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Source : Club cartophile de l’Yonne.
6Puis, devenue trop abondante, la production d’obus est relayée par celle de machines-outils (tours à obus et presses) pour Renault : l’entreprise a dans ce domaine un savoir-faire puisqu’au 1er janvier 1914 près d’un quart de ses machines-outils est composé d’unités fabriquées dans l’usine.
Tableau 1. Évolution du chiffre d’affaires de 1913 à 1921 (Estimations en milliers de francs de 1914)
Année
Machines à travailler le bois
Fabrications de guerre
Ensemble
1 000 F
%
1 000 F
%
1 000 F
%
1913
4 450
100 %
4 450
100 %
1914
2 700
100 %
2 700
100 %
1915
1 470
28 %
3 760
72 %
5 230
100 %
1916
2 860
34 %
5 690
66 %
8 550
100 %
1917
2 740
22 %
9 976
78 %
12 716
100 %
1918
2 580
22 %
9 192
78 %
11 772
100 %
1919
6 911
100 %
6 911
100 %
1920
6 300
100 %
6 300
100 %
1921
5 590
100 %
5 590
100 %
7Au total, les productions de guerre constituent de 1915 à 1918 les trois quarts de l’activité.
D’importants moyens humains
La tradition Guilliet
8En 1913, la main-d’œuvre, exclusivement masculine, est en très grande partie non qualifiée. Les ouvriers sont allés à l’école primaire, savent lire, écrire et compter, mais rares sont ceux qui ont un « métier » et maîtrisent des techniques à la fois traditionnelles et complexes. Sans véritable culture, la plupart sont jeunes. Plus d’un tiers vient de départements extérieurs à l’Yonne. Beaucoup ne restent que quelques semaines, voire moins. L’atmosphère est au travail. La recherche du consensus reste la règle.
Les nouveaux venus
9Une grande partie du personnel part sous les drapeaux dès la mobilisation. On n’a pas recours à des ouvriers des colonies, mais à quelques « vieux » et surtout à des femmes, d’abord aux épouses des mobilisés, puis à des volontaires, voire à des prostituées4.
Document 4. Les femmes participent aussi à la production d’obus au début de la guerre
Document 4. Les femmes participent aussi à la production d’obus au début de la guerre
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Source : Club cartophile de l’Yonne.
10Des spécialistes retirés du front arrivent à partir de novembre 1914. Les rappels sont d’abord nominatifs, puis sont doublés, à partir du 10 juin 1915, d’un système par contingent numérique : la direction demande aux autorités militaires un nombre de spécialistes précis et se voit attribuer par le Service ouvrier les hommes demandés, sans avoir la possibilité de les choisir. L’État dispose ainsi d’un formidable levier face à une entreprise en manque chronique de personnel. Les effectifs augmentent fortement. Ils font plus que doubler de 1914 à 1918, atteignant 2 056 personnes en août 1918 : 573 traditionnels (28 %), 830 mobilisés (40 %), 593 femmes (29 %) et 60 enfants (3 %).
Tableau 2. Évolution des effectifs de 1913 à 1921
Années
Effectifs
Effectifs moyens
Années
Effectifs
Effectifs moyens
Années
Effectifs
Effectifs moyens
1913
822a
1916
1 475a
1 661c
1919
1 425a
1 447b
1914
844a
887c
1917
1 960a
2 475c
1920
1 509a
1 561b
1915
887a
1 186c
1918
1 650a
2 110b
1921
1 468a
1 519b
N.B. 1 750 ouvriers le 28 février 1916, 2 700 le 11 janvier 1918, 2 000 le 17 août 1918 (3M1/358).
Sources : a. D’après les registres de patentes (AM Auxerre). b. D’après les archives de l’entreprise (AD Yonne, fonds Guilliet 48 J). c. Estimations d’après la consommation de fonte.
Réformistes et révolutionnaires
11Les affectés spéciaux viennent souvent de régions comme les Ardennes, le Nord ou la région parisienne, où la conscience politique est plus développée qu’à Auxerre5. Ils ont l’avantage du nombre (40 % des effectifs en août 1918 contre 28 % pour les locaux) et ont à leur tête un noyau très déterminé. Le 7 janvier 1916, ils sont les premiers à oser remettre en cause la décision d’un contrôleur militaire, mais restent en retrait par crainte des représailles. Ils élisent huit délégués lors du mouvement des 8 et 9 juin 1917, avant de s’effacer sous la pression. Ils prennent toutefois conscience de leur force, s’inscrivent massivement à la section socialiste et au syndicat, et jouent désormais un rôle moteur dans les mouvements.
12La direction réagit en privilégiant l’élément « vieil Auxerrois » en mettant chaque année gratuitement à la disposition de chaque ouvrier qui en fait la demande un jardin, en accordant des avantages spéciaux aux familles nombreuses, en fondant une caisse de secours en cas de maladie et une caisse de retraite, en encourageant la création d’une coopérative d’achat pour lutter contre la vie chère.
13Les « étrangers » réussissent toutefois à rallier à leur cause un nombre croissant d’« Auxerrois ». La cassure entre les deux principales composantes masculines du personnel s’estompe progressivement par capillarité. Le syndicat survit au départ des mobilisés à la fin de la guerre et est capable de « tenir » une grève massive de trois semaines en juin 19196.
Extension et modernisation de l’outil de production
14Les productions de guerre se contentent le plus souvent du matériel existant, de simples tours pour forer une barre d’acier, mais nécessitent aussi des fours à réchauffer, à tremper ou à recuire, des presses à sertir ou à poinçonner les obus, des chariots pour les transporter, etc. La consommation de fonte passe de 2 600 tonnes en 1914 à 9 500 en 1918. La fonderie est renforcée d’une étuve, d’un diviseur à sable, d’un broyeur et de deux cubilots.
15Une station électrique centrale est mise en service en 1916 au quai du Batardeau et une sous-station en 1917 rue Gérot. Désormais la force motrice n’est plus transmise par des axes et des jeux d’engrenages, mais par des câbles électriques alimentant de gros moteurs situés au bout des lignes, sur lesquelles sont reliées les machines-outils par des courroies.
16L’entreprise s’enrichit. De 1922 à 1926, elle paie 13 millions de francs d’impôts au titre des bénéfices de guerre. Par ailleurs, elle achète chaque année à Auxerre près de 100 000 francs (valeur de 1914) de terrains entre 1915 et 19197, tant sur la rive gauche, notamment 65 000 mètres carrés à l’arrière de l’usine de Preuilly, que sur la rive droite.
Guerre et innovation
17Fondée en 1847, l’entreprise dépose 27 brevets entre le 27 octobre 1854 et le 10 mai 1914. Elle est encore très fière en 1914 de la qualité du graissage des axes ou des arbres de transmission et autres organes rotatifs, pour lequel elle a déposé des brevets les 21 mars et 21 novembre 1866 : « Ce graissage est tellement parfait qu’on peut marcher à peu près indéfiniment sans que la machine prenne de jeu8. »
18Avant la guerre, l’innovation semble active9. Quels en sont les acteurs ? les aspects ? Change-t-elle de nature ?
Les acteurs de l’innovation
L’héritage du fondateur
19De 1854 à 1872, François Guilliet (1823-1901) avait déposé treize brevets : un « outil à faire des mortaises », une machine à rainer les parquets, une à fabriquer les moulures ou rainures, une à faire les mortaises, les rainures et à raboter le bois, etc. Or il n’avait eu qu’une formation générale très limitée car il aimait peu « lire, écrire, chiffrer10 ». Il avait commencé un tour de France et exercé divers métiers. Il avait su transposer les gestes de l’ouvrier après une analyse systématique des pratiques manuelles et de leur rationalisation et trouvé par pur empirisme des procédés efficaces sans analyse préalable des effets. La conception des outils et des machines, très simples dans leurs principes, n’exigeait que peu de connaissances scientifiques.
Le renfort des deuxième et troisième générations
20L’action de ce « bricoleur génial » avait été relayée par ses deux fils aînés, Germain (1849-1919) et Paul (1853-1918), formés sur le tas, puis par leurs jeunes frères : Joseph (1860-1930) et Georges (1863-1925), tous deux ingénieurs sortis de l’École nationale des arts et métiers de Châlons-sur-Marne. Joseph a rompu avec ses frères en 1905 et fondé une entreprise concurrente à Fourchambault (Nièvre) ; Georges a passé plusieurs années à Vienne en Autriche pour y développer les marchés ouverts par l’Exposition universelle de 1890 (médaille d’honneur), puis a fondé le bureau d’études. Ce technicien de grande valeur aux qualités de création exceptionnelles attache une grande importance à la formation professionnelle. Il aime s’attarder à l’atelier de modelage, converser avec l’un ou l’autre des ouvriers ou des apprentis, demander des explications sur certains travaux en cours11.
21La troisième génération n’offre pas des perspectives aussi solides. Ambroise Commergnat (1870-1942), gendre de Germain, est dans l’entreprise depuis juin 1905. Mais cet ingénieur de l’École centrale (1892) est cantonné à la direction de l’entreprise de charronnage mécanique qu’il a apportée en juin 1905 dans le capital de la nouvelle société Guilliet Fils & Cie. Jean Guilliet, né à Auxerre en 1886, a pris la place de son père, Paul, le 1er juin 1914, mais est tué au Mont-Donon (Vosges) le 21 août 1914. Robert Guilliet (1889-1943), fils de Georges, a une formation d’honnête homme et a le goût des lettres et des arts, mais des compétences techniques limitées. Il aime surtout les machines lourdes, solides, conformes à la tradition. Il est plus un homme de devoir qu’un chef capable de dynamiser toute une équipe autour de lui.
Le renfort des « soldats de la vieille garde »
22En 1913, près de 20 % des ouvriers ont plus de dix ans d’ancienneté. Ils sont fiers de la qualification qu’ils ont acquise sur le tas. Ils croient en leurs possibilités de promotion sociale grâce à l’apprentissage, aux cours pour adultes de dessin industriel à la charge de la société. Ils ont l’impression de participer à une aventure exaltante : « Que nous tenons l’outil, le tire-ligne ou la plume, nous sommes tous frères d’armes. Mais notre armée est pacifique. Notre drapeau est celui de l’industrie française. Il ne connaît pas de frontière. Il a franchi les continents et les mers. Nous continuons à le tenir haut12. » Parmi eux, Henri Alphonse (1865-?) se révèle être un excellent ajusteur et un pédagogue remarquable. La cohésion reste forte. Quand un ouvrier se voit confier un travail qui dépasse ses compétences, ses camarades l’aident en douce à fabriquer les pièces les plus difficiles13
23Parmi ces « soldats de la vieille garde », tous d’origine populaire, brille Jules-Henri Picard, ce fils d’un charpentier de marine, entré dans l’entreprise le 14 février 1891 après un bref passage comme apprenti dans une imprimerie auxerroise. Grâce à des cours du soir, il est devenu ouvrier ajusteur en 1896, puis chef du bureau d’études en 1905. Ce passionné de mécanique construit chez lui de toutes pièces plusieurs appareils photographiques et répare lui-même sa voiture14. À l’usine, il participe à la mise au point de nombreuses machines et, pendant la guerre, à celle des tours à obus. Il est particulièrement doué pour trouver des astuces de fabrication, des « trucs ».
Document 5. Jules-Henri Picard (1876-?) en mai 1948, à côté de Jean Commergnat, son patron, avec sa croix de chevalier de la Légion d’honneur
Document 5. Jules-Henri Picard (1876-?) en mai 1948, à côté de Jean Commergnat, son patron, avec sa croix de chevalier de la Légion d’honneur
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Source : Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne.
De nombreux brevets
24L’entreprise a déposé 14 brevets de 1906 à 1914 et en dépose 32 de 1921 à 1931.
Tableau 3. Répartition des brevets Guilliet de 1906 à 1931
Années
Machines nouvelles
Machines universelles ou combinées
Perfectionnements
Ensemble
1906-1914
3a
2
9
14
1915-1920
0
0
0
0
1921-1931
8b
5
19
32
a. Une scie alternative à une lame de côté, une machine à creuser les sabots, une machine double à creuser les talons de sabot.
b. Une scie à ruban, une scie circulaire à tronçonner le bois de chauffage, une machine à tronçonner les grumes, une dégauchisseuse pour le travail des moutures, une machine à tenons, enfourchements et contre-profils, une machine à rogner et à rainer en bout les lames de parquet, deux machines à tourner les rais.
25Les perfectionnements (61 % des brevets) visent :
une plus grande précision dans le centrage des outils, le réglage des tables, des arbres et des axes, grâce à l’introduction des roulements à billes qui permettent des déplacements d’une plus grande douceur ;
une plus grande sécurité grâce à la multiplication des appareils protecteurs autour de la lame et du volant supérieur des scies à ruban, autour des engrenages, des vis sans fin et de la roue des machines à tronçonner les arbres, etc. ;
un plus grand confort dans le travail de l’utilisateur avec la réduction du bruit (pour l’arbre de la toupie, les engrenages taillés des crémaillères) et de la poussière grâce à la pose d’un aspirateur dans la machine à mortaiser à chaîne et à un dispositif dans les scies à ruban ;
une plus grande automatisation dans la commande de l’avancement transversal des griffes dans la scie à ruban, dans les machines à creuser et à façonner les sabots.
26En réalité, l’avenir est hypothéqué.
Priorité au bâti en fonte
27Georges Guilliet rêve pendant toute la guerre de construire une fonderie extraordinaire. Il en conçoit tous les détails d’installation et d’organisation. Il parvient à la réaliser peu après grâce aux bénéfices engrangés pendant le conflit. Les machines à mouler de divers types sont réparties dans trois travées desservies chacune par plusieurs ponts roulants électriques de puissance de levage et de vitesse de translation correspondant aux fabrications. L’ensemble largement automatisé se passe désormais des modeleurs. Les pièces de fonte obtenues sont plus précises et plus régulières qu’auparavant. Les conditions de travail sont meilleures grâce aux installations évacuant les fumées ou absorbant les poussières et aux soins apportés à la propreté des sols et des cheminements. Cette « construction impeccable » défie toutes les critiques de l’étranger. Un magazine technique américain lui consacre même un long reportage15.
28Dans les catalogues des années 1920, les machines restent dotées d’un bâti en fonte d’une seule pièce. Leur poids continue d’être mis en avant. Ainsi les scies verticales alternatives à plusieurs lames, « devant résister sans vibrations à un travail fatigant, sont présentées comme extrêmement solides et lourdes (18 000 kilogrammes)16 ». L’équilibre reste « statique ».
Une apparition bien tardive des moteurs électriques
29L’entreprise n’ignore pas le moteur électrique. Elle en propose un dans son catalogue de 1930 pour une scie à tronçonner le bois de chauffage, en même temps qu’un moteur à explosion à essence pour une scie à ruban. Elle dépose même le 24 juillet 1933, avec les établissements Japy Frères, un brevet pour un moteur asynchrone à grande vitesse avec convertisseur de fréquence incorporé.
30Longtemps la construction d’un petit moteur électrique de prix très bas et d’emploi aisé ne reçoit pas de solution complètement satisfaisante. L’artisan de village en voie de disparition, plus enclin au repli qu’à la résistance, hésite à adopter l’électricité « parce que l’adoption de ce nouveau mode d’entraînement signifie un bouleversement complet de ses méthodes de travail et de l’organisation de son atelier et que le coût d’une telle innovation est forcément élevé17 ».
31Mais peu à peu le moteur électrique s’impose comme un auxiliaire indispensable au petit atelier artisanal. Grâce à sa petite taille, il peut être placé à l’intérieur de la machine. Par rapport au système traditionnel à courroies, ses avantages sont nombreux : un démarrage facile ; des arrêts moins fréquents ; un bon rendement économique sous toutes les puissances18 ; un entretien moins coûteux ; une vitesse de rotation de l’arbre-outil bien supérieure (jusqu’à 6 000 tours par minute dans les toupies contre 4 000 en 1914) ; une plus grande maniabilité car tous les organes de commande sont à la portée de l’opérateur ; un travail plus précis. Ainsi, l’appareil à mortaiser à chaîne peut être orienté dans tous les sens. De même, dans la défonceuse universelle, le modeleur ou le charpentier peut, grâce à l’inclinaison du moteur sur le chariot et à celle du chariot sur le bras porte-tête, effectuer les opérations les plus compliquées19.
Un recul face à la concurrence
32L’entreprise Guilliet est peu à peu dépassée. Après la Seconde Guerre mondiale, elle se heurte à la concurrence de firmes italiennes qui proposent des machines dotées de bâtis en fonte beaucoup plus minces (5 millimètres au lieu de 12) et de pièces en aluminium ou en plastique, et de ce fait, à la fois plus légères, plus esthétiques et moins chères.
33Pour réduire sa consommation de fonte et le coût des modèles de fonderie très élevé en petites séries, elle fait appel au mécano-soudé, mais comme elle en maîtrise mal la technique, les bâtis soudés se déforment sous l’effet des forces en jeu. Elle remplace la fonte par l’acier dès 1953 dans le bâti de la mortaiseuse à chaînes multiples, puis dans les tables des dégauchisseuses et des combinées et dans toutes les parties statiques des raboteuses. Mais cette substitution désarçonne une partie de la clientèle pour laquelle en 1967 « le poids respectable est traditionnellement considéré comme critère de qualité20 ». Elle pose aussi de sérieux problèmes dans les scies à ruban et les toupies dont les bâtis en tôle ne peuvent pas empêcher les vibrations entraînées par les grandes vitesses de rotation (volants et outils étant équilibrés avec plus ou moins de précision). Ce n’est que progressivement, au prix du sacrifice de nombreuses machines, que l’équilibre dynamique réussit à remplacer l’équilibre statique.
34Ainsi, l’innovation chez Guilliet ne change pas de nature avec la Première Guerre mondiale. Elle n’entretient aucun lien étroit entre la science et la technique. Elle reste fidèle à une logique d’apprentissage, qui met en valeur le rôle de l’expérience cumulative21. Elle ne fait que prolonger l’amateurisme du xviiie siècle.
Guerre et productivité
Pendant la guerre
35Paul Guilliet reçoit à Auxerre André Citroën avant qu’il signe le 10 février 1915 avec la direction des Forges et de l’Artillerie le contrat pour la fourniture d’obus à balles de type shrapnel. Lors d’une visite de l’usine du quai de Javel à Paris, il est même séduit par la vue des chaînes transportant les obus d’un poste à l’autre22. Mais il ne met pas en œuvre à Auxerre la production standardisée en grande série d’obus qui aurait exigé des investissements massifs et un gros effort de rationalisation. La consommation de main-d’œuvre reste donc extrêmement élevée. Les gains de productivité sont difficiles en raison des imperfections et du vieillissement de l’outil industriel23 : au 1er janvier 1914, 41 % du parc de machines-outils a plus de dix ans d’ancienneté, 22 % de cinq à dix ans et 37 % seulement moins de cinq ans. On fait ainsi en 1919 l’amer constat suivant : « On s’est habitué, en France, avant la guerre, à compter sur les hommes pour lutter contre les machines étrangères. Dans d’autres pays où l’outillage est plus moderne, l’adaptation aux conditions nouvelles est plus facile. Au lendemain d’une guerre qui nous a privés à la fois des hommes et des outils, la France sent plus douloureusement son infériorité24 ».
Après la guerre
L’introduction du taylorisme
36Dès 1922, de nouvelles méthodes de production inspirées de la taylorisation sont introduites. Jean Frémy, ingénieur des Arts et métiers, conçoit un schéma original de préparation et de régulation du travail. Un bureau central de fabrication groupant les divers services techniques, administratifs et comptables choisit comme opérateurs les meilleurs ouvriers. Chaque opérateur prend la place de l’ouvrier et fait son travail en sa présence. Un chronométreur consigne les résultats des temps. La fiche d’instruction alors établie par le bureau contient l’analyse détaillée de toutes les opérations ou gestes élémentaires nécessaires à l’exécution d’une opération prévue sur la gamme. Suivant la difficulté du travail, le poids des pièces, le changement plus ou moins fréquent des outils de coupe, est calculé un temps alloué, temps nécessaire à l’exécution d’une opération par un ouvrier moyen compte tenu des petits imprévus du travail. Ce temps alloué (TA) peut être décomposé en temps occupé (TO), somme de tous les temps de manœuvre pendant lequel l’ouvrier est effectivement occupé, et le temps disponible (TD), somme des temps de passe diminués chacun de la durée de surveillance à l’empointage et au dépointage de l’outil. La prime est payée en fonction du rapport TA/temps de présence et TO/temps de présence. Pendant ce temps disponible, l’ouvrier peut effectuer un deuxième travail. Apparaît la notion de temps masqué : le temps de travail de l’ouvrier diffère de celui de la machine25.
37Le montage des machines courantes se fait désormais par près de cent à la fois26. Dans celui des scies à ruban, on commence par les bâtis, puis on continue par les volants du haut, ceux du bas, etc., le tout dans un synchronisme parfait27. Les changements ne sont pas opérés dans un esprit « stakhanoviste ». Le chef d’équipe fait remarquer aux plus lents : « “L’équipe X a fait mieux. Il ne faut pas abuser.” L’impression prévaut qu’on peut mieux faire sans se fatiguer beaucoup. Des jeunes “tombent les temps” par gloriole. Les chronométreurs leur font alors comprendre qu’il ne faut pas blesser les ouvriers les moins habiles28. »
Peu de grandes séries
38En réalité, la production en grandes séries est incompatible avec le grand nombre de références au catalogue : 240 en 1895, 460 en 1914, autour de 500 dans les années 1920. Guilliet a multiplié les modèles pour satisfaire les artisans spécialisés : machines à faire les queues droites, les queues-d’aronde cachées, à raboter les douves, les raccourcir, jabler et biseauter, faire leurs joints, tourner les fonds de tonneaux, refendre le bois de merrain, faire les bondes, sept machines pour faire les galoches et sept autres pour faire les sabots, etc.
39Ainsi, de 1914 à 1918, l’entreprise développe son chiffre d’affaires et accumule les bénéfices grâce aux fabrications de guerre, mais elle reste fidèle à ce qui a fait son succès : une innovation fondée sur la méthode des essais et des erreurs et cherchant à trouver une réponse à un défi, à un appel lancé par le système technique lui-même qui est en état perpétuel de déséquilibre29 ; des méthodes de production fortement consommatrice de main-d’œuvre. Elle fait encore sienne sa devise de 1895 : « Nous avons cherché à faire bien, sans nous préoccuper de la dépense. »
Graphique 1. Évolution du chiffre d’affaires de 1892 à 1947 en francs constants de 1914
Graphique 1. Évolution du chiffre d’affaires de 1892 à 1947 en francs constants de 1914
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Source : d’après les archives de l’entreprise.
40La paix revenue, la voie choisie semble d’abord porter ses fruits. En 1924, les effectifs atteignent 1 860 personnes et le chiffre d’affaires 8,3 millions de francs, soit près du double de celui de 1913 (en valeur constante).
41En réalité, la baisse des commandes commence dès mai 1925. C’est le début d’un long déclin qui conduit à une faillite en 1978. Le marché de premier équipement est saturé. Celui de renouvellement est faible car les machines installées ont été conçues pour durer plusieurs générations. La concurrence se fait de plus en plus agressive à cause d’un retard technologique croissant et de coûts de production trop élevés et mal maîtrisés.
NOTES
1 Jean-Charles Guillaume, Guilliet. Histoire d’une entreprise, 1847-1979, Auxerre, Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne, 1986 ; idem, L’Évolution des pratiques industrielles dans l’Auxerrois, 1750-1914, Auxerre, Centre départemental de documentation pédagogique de l’Yonne, 1993, 722 p. Est exclue de cette étude l’usine de charronnage Commergnat qui fait partie de la même société.
2 Page de couverture du catalogue Guilliet de 1914.
3 Témoignages de Roger-Paul et de Jacques-André Guilliet, fils de Paul, le 23 février 1986.
4 Témoignage de Robert Roussel. Né en 1902, titulaire d’un simple certificat d’études primaires, ce fils d’un modeleur mécanicien embauché en 1909 a travaillé chez Guilliet comme apprenti modeleur de 1916 à 1919.
5 Témoignage d’Adrien Langumier. Né en 1902, ce fils d’artisan sabotier a commencé à travailler chez Guilliet pendant les étés 1915 et 1916, puis comme apprenti à partir d’octobre 1918. Voir Jean-Charles Guillaume, « Adrien Langumier, un militant révolutionnaire dans l’Yonne », Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne (BSSY), vol. 120, 1988, p. 149-158.
6 J.-C. Guillaume, « Guilliet. Une usine auxerroise dans la Grande Guerre, 1914-1920 », Les cahiers d’Adiamos 89, nº 11, avril 2014, 247 p.
7 D’après la Conservation des hypothèques d’Auxerre.
8 Ou encore : « Ce graissage est tellement parfait que l’on n’a jamais d’échauffement ni d’usure, et cela pour une dépense d’huile insignifiante », « Machines à dégauchir à outil rotatif en dessous », cote CH-CI-CK-KR-KS-CM-KT du catalogue de 1914, p. 179.
9 J.-C. Guillaume, « L’innovation dans l’industrie mécanique d’une région rurale : l’exemple de l’Auxerrois, 1850-1911 », in Michèle Merger et Dominique Barjot (dir.), Les entreprises et leurs réseaux : hommes, capitaux, techniques et pouvoirs, xixe-xxe siècles. Mélanges en l’honneur de François Caron, Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 1998, p. 749-757.
10 Adrien Lechat, M. Guilliet-Perreau, esquisse biographique, Auxerre, Rouillé, 1885, p. 7.
11 Témoignages de Robert Roussel et d’Émile Julien Milleret. Ce dernier est entré comme ajusteur chez Guilliet en 1924, après deux années d’études à l’école d’industrie d’Auxerre et deux années à l’école préparatoire de Cluny.
12 Allocution de M. Marchais père lors de la nomination de Paul Guilliet au titre de chevalier de la Légion d’honneur le 28 mai 1910, Le Bourguignon, 30 mai 1910.
13 Témoignage de Robert Roussel.
14 Témoignage d’Henri Picard, fils de Jules-Henri Picard.
15 Témoignage de Jean Frémy, assisté de Georges Cagnat et de Fernand Coeffard. Jean Frémy a travaillé dans l’entreprise de 1914 à 1961 et est devenu chef de fabrication après la mort de Georges Guilliet, en 1925.
16 Modèles BDA-BD-BE-BF-BFK du catalogue de 1914, p. 29. Il en est de même pour les modèles NC-ND-NF-NG-NH, p. 31, et BDG-BEG-BFG, p. 33.
17 Henri Morsel, « Les freins à l’adoption du moteur électrique, à ses origines, en France », Bulletin de l’histoire de l’électricité, nº 16, décembre 1990, p. 9-25.
18 Journal d’agriculture pratique. Moniteur des comices, des propriétaires et des fermiers, 5 juillet 1900, p. 40.
19 Catalogue Guilliet de 1939.
20 Guilliet GMBH, 1965-1972, archives de l’entreprise.
21 François Caron, « La dynamique des modèles techniques français et allemand », in Yves Cohen et Klaus Manfrass (éd.), Frankreich und Deutschland. Forschung, Technologie und industrielle Entwicklung im 19. und 20. Jahrhundert, Internationales Kolloquium herausgegeben für das Deutsche Historische Institut Paris, Munich, C. H. Beck, 1990, p. 28.
22 Paul Guilliet se serait écrié : « Citroën est un drôle de bonhomme ! On en entendra parler ! », témoignage de Roger-Paul et de Jacques-André Guilliet.
23 Toshikatsu Nakajima, « L’impact de la guerre 1914-1918 sur l’industrie mécanique de la région parisienne », Histoire, économie et société, vol. 12, no 4, 1993, p. 537-552.
24 Le Bourguignon, 2 juin 1919.
25 Jean Frémy, Préparation et régulation du travail dans une usine de constructions mécaniques. Usines Guilliet en 1939, Alençon, Imprimerie alençonnaise, 1946.
26 Rapport à l’assemblée générale de février 1923.
27 Témoignage de Jean Frémy.
28 Témoignage d’Émile Julien Milleret.
29 François Caron, « Histoire technique et histoire économique », Histoire, économie et société, nº 1, 1983, p. 7-17.
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Titre Document 1. Les usines Guilliet à Auxerre vers 1927
Crédits Source : Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne.
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 112k
Titre Document 2. La machine universelle Guilliet pour menuisiers et fabricants de meubles en 1914
Crédits Prix : 4 700 francs ; Poids : 2 120 kilogrammes ; Force motrice : 5 chevaux (3,675 kilowatts).
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 436k
Titre Document 3. Quelques ouvriers lors d’une coulée à la fonderie Guillet pendant la guerre
Crédits Source : Club cartophile de l’Yonne.
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 380k
Titre Document 4. Les femmes participent aussi à la production d’obus au début de la guerre
Crédits Source : Club cartophile de l’Yonne.
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 84k
Titre Document 5. Jules-Henri Picard (1876-?) en mai 1948, à côté de Jean Commergnat, son patron, avec sa croix de chevalier de la Légion d’honneur
Crédits Source : Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne.
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 276k
Titre Graphique 1. Évolution du chiffre d’affaires de 1892 à 1947 en francs constants de 1914
Crédits Source : d’après les archives de l’entreprise.
URL http://books.openedition.org/igpde/docannexe/image/4968/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 108k
AUTEUR
Jean-Charles Guillaume
Agrégé de géographie (1972), Jean-Charles Guillaume enseigne au lycée d’Auxerre jusqu’en 2009. Il participe à la fondation de la revue Géographie et recherche, puis cofonde la revue Géographie 89. Il fait paraître Guilliet, histoire d’une entreprise, 1847-1979, puis Le travail de l’ocre dans l’Auxerrois, 1763-1966. Il obtient un doctorat en histoire à Paris-Sorbonne en 1993 avec une thèse sur L’évolution des pratiques industrielles de l’Auxerrois, 1750-1914. Il publie depuis lors divers ouvrages.
Institut de la gestion publique et du développement économique, 2018
Conditions d’utilisation : http://www.openedition.org/6540
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La pratique c'est quand tout marche à merveille et que personne ne sait pourquoi.
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Re: Guilliet machines à bois, histoire de la société
L'Yonne Republicaine
Que reste-t-il de l'empire industriel des Guilliet aujourd'hui ?
Les usines Guilliet ont marqué l'histoire industrielle d'Auxerre et de tout le département. Mais que reste-t-il des bâtiments construits par l'entreprise ?
D'un simple atelier d'ébéniste en 1847 à une entreprise employant plus de 2.000 personnes entre-deux-guerres, l'entreprise créé par François Guilliet, empire familial jusqu'en 1979, a façonné le paysage industriel d'Auxerre.
"En 1913, l'entreprise Guilliet Fils et Cie fait vivre directement près de 10% de la population d'Auxerre. Elle exporte en Europe occidentale et dans le monde entier", raconte l'historien auxerrois Jean-Charles Guillaume, dont la participation au colloque L'industrie dans la grande guerre, "L'activité d'un constructeur de machines-outils pendant la Grand Guerre : l'entreprise Guilliet à Auxerre", vient d'être publiée par l'Institut de la getion publique et du développement économique.
Mais que reste-t-il, aujourd'hui, des usines Guilliet ?
Des maisonsAux Chesnez (hameau d'Auxerre), se trouve une propriété de 75 hectares. Elle a appartenu à la famille Guilliet jusqu'au décès de Marie-Claire Guilliet, en 2012, qui en avait fait don au Vatican. La demeure et son parc sont à vendre, en plusieurs lots.
Aux Chesnez (hameau d'Auxerre), se trouve une propriété de 75 hectares.
Mais ce n'est pas la seule maison qui rappelle le poids des Guilliet dans l'histoire industrielle de l'Yonne. C'est le cas de l'actuel muséum d'Auxerre, qui a été habité par les Guilliet (la maison était passée dans la famille par mariage)... Mais aussi des maisons du quartier Saint-Gervais Brazza. Certaines sont en effet des maisons d'ouvriers Guilliet, témoins du paternalisme de l'entreprise à sa grande époque.
Des bâtiments industrielsDans un premier temps, l'entreprise créée par François Guilliet s'est développée rue du Temple. De cette époque subsiste l'architecture industrielle à l'intérieur d'un laboratoire médical, rue du Saulce. Il subsiste l'architecture industrielle à l'intérieur d'un laboratoire médical, rue du Saulce.
À l'étroit en centre-ville, l'entreprise s'est ensuite installée le long du boulevard Vaulabelle. La salle des fêtes de l'entreprise est aujourd'hui la salle Vaulabelle. Des bâtiments d'usine, reconnaissables à la forme de leurs toits, sont encore visibles sur le boulevard, ou encore rue Gérot.
Des bâtiments d'usine, reconnaissables à la forme de leurs toits, sont encore visibles rue Gérot.
Mais l'expension ne s'arrête pas là. Une fabrique de roues, située au niveau de l'actuelle chambre économique, est acquise par mariage en 1896. Les magasins des Champoulains, plus éloignés du bord de l'Yonne, viennent s'ajouter, le long de l'actuelle avenue Mermoz. En 1920, l'ensemble industriel des Guilliet était donc composé de quatre parties, à Auxerre.
Cliquez sur les points pour découvrir à quoi ressemblent ou ressemblaient ces lieux en rapport avec l'histoire de l'entreprise Guilliet. Cliquez sur l'icône en bas à gauche pour aggrandir l'image.
Si vous ne parvenez pas à voir cette image interactive, cliquez ici.
Un nomEn 1978, l'entreprise Guilliet dépose une première fois le bilan et, l'année suivante, la famille cesse de la contrôler. Mais la fonderie, rue Gérot, a fonctionné jusqu'en avril 2010. Et une entreprise "Chambon-Guilliet", "fabricant de machines à bois depuis 1847" existe encore, à Coustance, dans le Jura. Selon l'historique de cette entreprise, Guilliet aurait été intégrée au sein de la compagnie Chambon SAS en 1993, elle même racheté par le groupe HACO.
Le saviez-vous ? Il existe également une rue François Guilliet, à Auxerre, reliant la rue du Moulin du Président à l'Avenue de la Turgotine.
Myriam Lebret
myriam.lebret@centrefrance.com
Que reste-t-il de l'empire industriel des Guilliet aujourd'hui ?
Les usines Guilliet ont marqué l'histoire industrielle d'Auxerre et de tout le département. Mais que reste-t-il des bâtiments construits par l'entreprise ?
D'un simple atelier d'ébéniste en 1847 à une entreprise employant plus de 2.000 personnes entre-deux-guerres, l'entreprise créé par François Guilliet, empire familial jusqu'en 1979, a façonné le paysage industriel d'Auxerre.
"En 1913, l'entreprise Guilliet Fils et Cie fait vivre directement près de 10% de la population d'Auxerre. Elle exporte en Europe occidentale et dans le monde entier", raconte l'historien auxerrois Jean-Charles Guillaume, dont la participation au colloque L'industrie dans la grande guerre, "L'activité d'un constructeur de machines-outils pendant la Grand Guerre : l'entreprise Guilliet à Auxerre", vient d'être publiée par l'Institut de la getion publique et du développement économique.
Mais que reste-t-il, aujourd'hui, des usines Guilliet ?
Des maisonsAux Chesnez (hameau d'Auxerre), se trouve une propriété de 75 hectares. Elle a appartenu à la famille Guilliet jusqu'au décès de Marie-Claire Guilliet, en 2012, qui en avait fait don au Vatican. La demeure et son parc sont à vendre, en plusieurs lots.
Aux Chesnez (hameau d'Auxerre), se trouve une propriété de 75 hectares.
Mais ce n'est pas la seule maison qui rappelle le poids des Guilliet dans l'histoire industrielle de l'Yonne. C'est le cas de l'actuel muséum d'Auxerre, qui a été habité par les Guilliet (la maison était passée dans la famille par mariage)... Mais aussi des maisons du quartier Saint-Gervais Brazza. Certaines sont en effet des maisons d'ouvriers Guilliet, témoins du paternalisme de l'entreprise à sa grande époque.
Des bâtiments industrielsDans un premier temps, l'entreprise créée par François Guilliet s'est développée rue du Temple. De cette époque subsiste l'architecture industrielle à l'intérieur d'un laboratoire médical, rue du Saulce. Il subsiste l'architecture industrielle à l'intérieur d'un laboratoire médical, rue du Saulce.
À l'étroit en centre-ville, l'entreprise s'est ensuite installée le long du boulevard Vaulabelle. La salle des fêtes de l'entreprise est aujourd'hui la salle Vaulabelle. Des bâtiments d'usine, reconnaissables à la forme de leurs toits, sont encore visibles sur le boulevard, ou encore rue Gérot.
Des bâtiments d'usine, reconnaissables à la forme de leurs toits, sont encore visibles rue Gérot.
Mais l'expension ne s'arrête pas là. Une fabrique de roues, située au niveau de l'actuelle chambre économique, est acquise par mariage en 1896. Les magasins des Champoulains, plus éloignés du bord de l'Yonne, viennent s'ajouter, le long de l'actuelle avenue Mermoz. En 1920, l'ensemble industriel des Guilliet était donc composé de quatre parties, à Auxerre.
Cliquez sur les points pour découvrir à quoi ressemblent ou ressemblaient ces lieux en rapport avec l'histoire de l'entreprise Guilliet. Cliquez sur l'icône en bas à gauche pour aggrandir l'image.
Si vous ne parvenez pas à voir cette image interactive, cliquez ici.
Un nomEn 1978, l'entreprise Guilliet dépose une première fois le bilan et, l'année suivante, la famille cesse de la contrôler. Mais la fonderie, rue Gérot, a fonctionné jusqu'en avril 2010. Et une entreprise "Chambon-Guilliet", "fabricant de machines à bois depuis 1847" existe encore, à Coustance, dans le Jura. Selon l'historique de cette entreprise, Guilliet aurait été intégrée au sein de la compagnie Chambon SAS en 1993, elle même racheté par le groupe HACO.
Le saviez-vous ? Il existe également une rue François Guilliet, à Auxerre, reliant la rue du Moulin du Président à l'Avenue de la Turgotine.
Myriam Lebret
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